Monsieur le Premier Ministre,
La France est le 1er pays agricole européen et un leader mondial pour l’exportation de produits agricoles et agroalimentaires. L’Alimentation française est internationalement reconnue comme étant le « modèle le plus durable du monde ». Nos filières alimentaires et bioénergie ont fait la preuve de leur résilience face aux difficultés sanitaires, économiques et sociales engendrées par la pandémie du Covid-19.
La filière betterave-sucre-bioénergie française est aujourd’hui en péril. C’est pourtant l’un des fleurons de l’excellence française en matière agroalimentaire : 25 000 betteraviers et 21 sucreries, 45 000 emplois directs, 1er producteur européen de sucre et de bioéthanol pour plus d’1 Md € d’excédent commercial.
Ce secteur fait aujourd’hui face à une épidémie d’ampleur provoquée par des attaques de pucerons, vecteurs de la jaunisse virale. Depuis l’interdiction des néonicotinoïdes, les agriculteurs sont conduits à traiter jusqu’à 4 fois en plein champs sans pouvoir protéger leurs betteraves. Véritable non-sens économique, environnemental et sociétal : c’est une impasse technique que l’on sait mais que l’on tait !
Le résultat est sans appel : plus du tiers de nos betteraves est malade avec 30 à 50 % de la production perdue ! C’est une perte probable supérieure à 150 M€ et qui pourrait même atteindre les 200 M€ pour les planteurs, l’ampleur de l’épidémie étant croissante : certains agriculteurs perdront plus de 1000 € par hectare, un drame pour ces exploitants !
Si rien n’est fait ce sont des surfaces cultivées en baisse, des exploitations et des sucreries qui ferment, des emplois supprimés, une filière qui meurt et qui entraine avec elle son territoire. C’est enfin un accroissement de notre dépendance alimentaire au bénéfice notamment du sucre d’importation.
Le triste exemple de ces betteraves malades met en lumière des impasses techniques de plus en plus nombreuses qui mettent à mal nos autres productions : nombreuses cultures légumières et fruitières, colza, productions de semences etc., dont les effets accentués par un dérèglement climatique indéniable, sont dévastateurs !
Nos agriculteurs font face à une réduction drastique du nombre de solutions jusqu’à des absences totales comme pour la jaunisse virale quand nous martelons depuis des mois « pas d’interdiction sans solution ». Ils font aussi face aux distorsions de concurrence, sur cette filière comme sur d’autres, qui ne sont pas soumises aux mêmes contraintes y compris au sein de l’Union européenne. Nous sommes proactifs, volontaires, notamment au travers du Contrat de solutions.
Monsieur le Premier ministre, nous souhaitons comme vous placer l’écologie au cœur de la reconstruction de notre modèle économique et de nos territoires. Cela doit se traduire avec des actes concrets et pragmatiques en proposant des solutions viables pour les agriculteurs au plus près de nos filières. C’est aussi ce qui permettra de faire en sorte que, demain, les agriculteurs soient encore nombreux sur nos territoires !
Hélas, la bonne volonté politique affichée ne suffit pas, il faut des actes courageux ! Soyons capables de décréter un Etat d’urgence sanitaire quand la santé de nos plantes est en jeu pour donner des leviers à nos agriculteurs, leur permettre de les protéger et de protéger notre alimentation.
Les agriculteurs français incarnent cette ambition partagée par votre Gouvernement : retrouver une souveraineté alimentaire, renforcer notre indépendance agricole industrielle et énergétique et engager notre économie vers la décarbonation.
Monsieur le Premier ministre, nous exigeons une réponse efficace et immédiate pour sortir de l’impasse, une réponse agronomique, économique, technique et législative afin de surmonter cette crise et de garantir nos moyens de production. La clef de la souveraineté alimentaire appelée de ses vœux par le Président de la République est là ! Nous y sommes prêts !
Christiane LAMBERT, Présidente de la FNSEA
Samuel VANDAELE, Président de JA
Franck SANDER, Président de la CGB